Le premier ministre Manuel Valls a donc décidé d’employer la manière forte afin de faire passer la Loi Travail. Comme pour la très contestée Loi Macron, le gouvernement utilisera donc l’article 49-3 dans le but de faire voter une loi rejetée par une immense majorité du peuple français.
Cette utilisation du 49-3 est le symbole même d’un gouvernement aux abois qui ne sait plus comment faire voter des lois anti-sociales rejetées par une majorité de la population. Ce coup de force est en réalité un signe d’une immense faiblesse, celui d’un pouvoir à l’agonie, isolé, ne représentant plus personne si ce n’est le patronat qu’il n’a cessé d’adouber depuis quatre ans.
Cela dit, nous nous condamnerions à l’impuissance et à l’apathie si nous restions sur une simple critique du gouvernement et de ce vulgaire 49-3. C’est pourquoi, il nous est plus que jamais requis d’interroger et de remettre en cause profondément les institutions ainsi que le système économique et politique dominant.
Karl Marx a écrit il y a deux cents ans que les gouvernements des pays capitalistes n’étaient que les «fondés de pouvoir du Capital». Comment mieux décrire nos gouvernements à l’heure de la Loi Travail, de la loi Macron ou encore du Pacte de Responsabilité? Depuis quatre ans, le pouvoir dit «socialiste» de droite mène une véritable guerre de classe contre les salariés, les chômeurs, les pauvres, les faibles…
Et quand les naufragés du néolibéralisme relèvent la tête en allant manifester, en occupant des places, en revendiquant le droit à l’existence, à une vie digne, alors le pouvoir n’hésite pas à recourir à la violence physique pour les faire taire.
Mais la violence n’est pas que physique, il est une autre violence, subtile et symbolique qui se voit moins, qui frappe non pas les corps mais les esprits, une violence sociale qui provoque d’innombrable ravages. Cette violence c’est celle du capitalisme, un système basé sur l’hyper-profit de quelques-uns et le dénuement du plus grand nombre. Un système injuste et inégalitaire, cruel et criminel.
La Loi Travail que ses défenseurs politiques et médiatique qualifient de «moderne» est en réalité d’un incroyable archaïsme. C’est une loi qui balaye les historiques conquêtes ouvrières obtenues ces deux derniers siècles. C’est pourquoi on ne peut demander d’une telle loi aussi ignoble et anti-sociale qu’elle soit revu, modifié, amendé. Non! Le bon sens et la dignité humaine exigent que cette mesure soit purement et simplement renvoyée dans les poubelles de l’histoire, d’où elle n’aurait jamais du sortir.
Et puis comment peut-on encore parler de «démocratie» quand de telles institutions empêchent le peuple de délibérer sur des questions aussi fondamentales que le droit du travail? Quelle est cette démocratie où l’on compte seulement 1,6% de députés ouvriers et employés à l’Assemblée Nationale alors que ces derniers représentent plus de 50% de la population active? Robespierre a ainsi déclaré dans un de ses discours: «Partout où le peuple n’exerce pas son autorité, et ne manifeste pas la volonté par lui-même, mais par des représentants, si le corps représentatif n’est pas pur et presque identifié avec le peuple, la liberté est anéantie». Cette phrase déclarée le 18 mai 1791 est d’une brûlante actualité. Elle décrit à merveille cette rupture consommée entre citoyens et soi-disant «représentants».
La liberté du peuple français est en effet aujourd’hui anéantie par un système qui ne supporte pas de voir les citoyens se mêler de politique.
Rappelons qu’en 2005, le peuple français avait voté à 55% contre le Traité Constitutionnel Européen et que trois ans plus tard, la droite, c’est à dire l’UMP et le Parti Socialiste avaient voté fait adopté ce même texte à l’Assemblée Nationale sans consulter les citoyens.
Cette utilisation du 49-3, ce coup de force de la droite exprime mieux que jamais le mépris qu’a l’oligarchie pour le peuple. Ce dernier peut manifester, revendiquer, protester, il ne semble pas être entendu par un pouvoir déterminé à faire voter une loi tout droit sortie des manuels du Medef.
Et pourtant, cet attentat à la démocratie doit être une chance et une opportunité pour nous. Elle doit nous faire prendre conscience que la lutte, la vraie, ne s’est jamais jouée dans les salons feutrés du Parlement mais dans la rue. Toutes les grandes manifestations et revendications des masses, de la révolte des Canuts en 1831 à l’abandon du CPE en 2006 en passant par les grèves de 1936, toutes ont eu lieu dans la rue.
L’attitude méprisante et arrogante du gouvernement envers les opposants à la Loi Travail doit impérativement nous pousser à radicaliser la contestation sociale afin de nous faire entendre par ce pouvoir aux ordres du patronat.
Saint Just a écrit: «Le peuple n’a qu’un seul ennemi, c’est son gouvernement». A nous d’en tirer les leçons et d’agir en conséquence.
Tarik Bouafia, membre de la JC 66